Trafic de cocaïne en Côte d’Ivoire : premières auditions des hommes d’affaires suspectés.

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L’instruction de l’affaire du démantèlement, en avril dernier, d’un réseau de trafic de cocaïne entre l’Amérique du Sud, la Côte d’Ivoire et l’Europe se poursuit. Les hommes d’affaires visés par l’enquête ont été entendus par le pôle pénal économique et financier. Coulisses.

A Abidjan, les juges du pôle pénal économique et financier du Tribunal de première instance d’Abidjan Plateau sont sous pression. Ils sont en effet chargés d’instruire une affaire sensible, dans laquelle plusieurs hommes d’affaires très connectés aux sphères politico économique et judiciaire sont impliqués.
La Grande loge de Côte d’Ivoire (GLCI), dont certains membres influents ont été arrêtés dans le cadre de cette enquête, fait profil bas.
Le Grand maître Sylvère Koyo a préféré suspendre dès juin les deux << frères de lumière » suspectés d’être impliqués dans cette affaire : Richard Ghorayeb et Dominique Amata..

Fin août, les juges ont commencé à auditionner les suspects, déjà entendus par la police. Selon nos sources, Hussein Taan a été questionné durant plusieurs heures par Jean Claude Aboya, l’un des juges du pôle pénal, sur certains flux financiers réalisés à travers des gâteaux et du pain, pâtisserie fondée par son père en 2008, dont il est le gérant, et Pasta e Pizza, un restaurant qu’il a co-créé avec un Italien, dont les parts ont été rachetées par Bartolo Bruzzaniti.
Ce dernier fut condamné en Italie il y a une dizaine d’années avant de s’installer en Côte d’Ivoire.

Comptes bancaires et téléphone épluchés

Bruzzaniti a quitté le pays en mars dernier. Hussein Taan a également été interrogé sur l’origine de plusieurs transactions financières entre la Côte d’Ivoire et la France, de l’ordre de plusieurs centaines de milliers d’euros et ayant servi à des investissements immobiliers à Nice.
De son côté, Richard Ghorayeb a été entendu durant plusieurs heures également, toujours par le juge Aboya, sur ses relations avec Angelo Ardolino, un Italien lié à la mafia napolitaine et condamné à 20 ans de prison par le Tribunal correctionnel d’Abidjan en février 2021.

Ce dernier avait été arrêté en juin 2019 lors d’une opération menée par les polices ivoirienne, française, italienne et brésilienne.
Il dirigeait une société, AGL, basée dans la capitale ivoirienne et spécialisée dans l’immobilier, le BTP et l’import de matériaux, dont Ghorayeb est actionnaire – il avait, à ce titre, été interrogé à l’époque.
C’est d’ailleurs dissimulée dans des engins de chantier, à savoir des rouleaux compresseurs, que la police du port de Santos, au Brésil, avait découvert 1,2 tonne de cocaïne en septembre 2018.

Depuis son arrestation,es comptes bancaires de Richard Ghorayeb, membre de la GLCI, ont été épluchés et son téléphone, exploité. Les enquêteurs y ont découvert le numéro de José Maria Muniz Cadabal, un Espagnol de 47 ans présent depuis plusieurs années en Côte d’Ivoire, où il avait ouvert une école de commerce. Pilier du réseau démantelé en juin dernier, ce dernier est connu sous le pseudonyme de << Virus » par les services français et espagnols.

Avec Picabea Carnes Aitor, il fut impliqué, le 1er décembre 2021, dans une rocambolesque tentative de transbordement de drogue au large du Golfe de Guinée.
Devant le juge, Ghorayeb a assuré qu’il ne connaissait pas José Maria Muniz Cadabal. Ses avocats ont déposé une demande de main levée sur les saisies bancaires opérées sur ses comptes.
Enfin, Dominique Amata, lui aussi << frère » influent de la GLCI, a notamment été interrogé sur ses liens supposés avec des membres du réseau sud-américain démantelé en juin.

Confrontations entre les suspects

Les enquêteurs préparent désormais des confrontations entre les suspects, d’ici au début du mois d’octobre.
Une partie est actuellement en détention à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca) dans des cellules séparées, afin d’éviter tout contact entre eux auparavant. Toutes leurs demandes de remise en liberté conditionnelle ont été rejetées par les juges. Mais, après ces nouveaux interrogatoires, les avocats de Ghorayeb en formuleront une nouvelle.

Ce dossier est personnellement suivi par Alassane Ouattara, qui prône la tolérance zéro malgré la proximité de certains suspects avec les milieux politiques proches du parti présidentiel, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Le chef de l’État reste convaincu que le trafic de drogue a des ramifications avec les réseaux terroristes opérant au Sahel. Pour faire avancer les dossiers liés à la criminalité économique, il a nommé en août un procureur spécial, Oumar Braman Koné.

Auteur :

Source : Jeune Afrique

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