Bamba Alex Souleymane : Au Pdci, Quelques Personnalités N’ont Pas Le Courage De Montrer Leur Vrai Visage

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Nous avons reçu à notre rédaction, le mercredi 21 août dernier, Souleymane Alex Bamba. L’homme n’est plus à présenter aux Burkinabè, encore moins aux Ivoiriens. Il se réclame d’ailleurs être des deux nationalités et ce n’est pas faux. Tant il est, depuis des lustres, à cheval sur Ouagadougou et Abidjan et n’hésite pas à se prononcer sur la vie politique des deux pays. Il n’hésite surtout pas à prendre position pour tel ou tel homme politique selon ses convictions politiques et idéologiques. C’est ainsi que dans cet interview, BAS (c’est ainsi qu’on l’appelle affectueusement en Côte d’Ivoire), sans langue de bois, montre tout son attachement aux deux personnages politiques qui dirigent les deux pays amis et frères : Blaise Compaoré et Alassane Dramane Ouattara. BAS est revenu, en long et en large, sur les temps forts de la crise postélectorale en Côte d’Ivoire. Il parle aussi de sa vie de journaliste et de politique. Lisez plutôt.

« Le Pays » : Dans quel cadre situez-vous votre visite au Burkina Faso ?

Souleymane Alex Bamba : Je vous remercie pour l’occasion que vous m’offrez pour traduire, à nouveau, ma reconnaissance, mon amitié et ma très grande fraternité à ce grand peuple. C’est un plaisir pour moi d’être ici, chez moi. J’y suis dans un cadre privé pour me ressourcer. Comme vous le savez, nous sortons d’une guerre combien terrible et depuis, je ne suis pas retourné au Burkina Faso, singulièrement à Ouagadougou. C’est donc un plaisir pour moi de vous retrouver tous, et de porter témoignage à ce grand peuple dont les valeurs cardinales sont la dignité, la fierté et le travail. Je suis ici chez moi pour quelques jours afin de respirer l’air frais de la vraie liberté.

On vous voit beaucoup sur la scène politique. Etes-vous désormais plus homme politique que journaliste ?

Vous savez, on reste éternellement journaliste quelles que soient les responsabilités qu’on a, et qu’on pourrait avoir. J’ai eu la chance d’être à la fois un homme de science et de culture, de savoir et de connaissances, et mes nombreuses expériences m’ont conforté dans cette thèse que le substrat du savoir technologique et scientifique du journaliste lui restent chevillés au corps et aident à des moments très importants à s’élever et à dominer les autres. Il en a été ainsi pour moi dans beaucoup d’occasions, de nombreuses activités dans des sphères où, a priori, je n’étais pas attendu mais là où j’ai transcendé avec un parcours académique qui me le permettait. Je suis journaliste même si j’ai des responsabilités étatiques aujourd’hui. Je suis le directeur général de deux quotidiens, à savoir La Matinale et le Républicain.

Vous êtes à la fois patron de presse et politique pour ainsi dire. Cette situation n’affecte-t-elle pas la crédibilité de vos journaux ?

C’est une question pertinente ; c’est vrai que c’est très difficile d’être à la fois politique estampillé comme tel et de faire des produits censés être destinés à tout le monde. Quelle est la part de partialité dans cette entreprise censée être mise à la disposition de tout le monde, et quelle est la part d’objectivité ? C’est là où l’alchimie entre en ligne de compte entre l’honnêteté qui commande dans notre métier, aux plans éthique et déontologique, d’être attaché aux faits et d’être capable de faire des commentaires qui ne dénaturent pas ces mêmes faits.

On a souvent accusé la presse ivoirienne d’être une presse d’opinions, c’est-à-dire des organes de presse affiliés à des partis politiques. N’est-il pas temps qu’on dépasse cela pour le bien-être de la presse elle-même parce que cette situation n’a pas manqué de produire des dérapages ?

La presse de mon pays a fait du tort, du mal ; je l’ai dit et écrit et les gens connaissent ma position là-bas. Environ 80% de la survenue de cette crise a résulté des positions extrêmes de la presse ivoirienne, notamment depuis la disparition du président Houphouët-Boigny. On a voulu classifier des citoyens de premier ordre, et de deuxième ordre, des Ivoiriens de souche multiséculaire de père et de mère eux-mêmes Ivoiriens d’origine, comme si la Côte d’Ivoire n’avait pas été indépendante qu’en 1960, et qu’en 1893 quand les colons ont défini les contours une partie du Burkina Faso, du Mali et même du Ghana et qu’en plus, du point de vue ethnosociologique, les peuples se ressemblaient. Certains d’un côté et les autres de l’autre. Malgré tout cela, des gens ont voulu trié à l’intérieur de tout cela. Mais la terre est consubstantielle à l’espèce humaine. Nous ne savions pas que les Badolo et les Kaboré étaient des Burkinabè ; ils étaient nos amis. C’est après qu’on a levé l’épouvantail du moi Ivoirien et lui étranger. Toute chose ayant engendré des fissures dans la société. Et la presse aux ordres et à la remorque des partis politiques de puissants riches, ont investi, au propre comme au figuré, la presse. Ces derniers, voulant prendre le pouvoir, ont commencé à écrire pour pilonner la politique de l’« ivoirité », l’acharnement contre Alassane Ouattara et tous les autres. C’était, à la limite, du lynchage médiatique. Et quand je regarde le comportement de certains d’entre eux, j’en ris parce que j’étais face à eux, le commandant en chef des troupes, qui défendait le chef du gouvernement d’Houphouët-Boigny, le président Ouattara. Le journalisme est une science exacte et on peut en sortir des documents écrits et sonores aujourd’hui.

On a parlé de dérapages en son temps, mais quelle a été votre position à vous ? Aviez-vous observé la neutralité ou aviez-vous pris aussi votre parti en tant que propriétaire d’organe de presse ?

J’ai adopté une position totalement engagée contre les « Ivoiritaires » et à tout moment. Le président Blaise Compaoré a eu le courage déjà, pendant les événements de Tabou en 1998-99, de dénoncer la posture de certaines autorités à l’égard des populations burkinabè dans les plantations. J’étais le patron du journal « L’Agora », le seul, à l’époque d’ailleurs, dans lequel s’exprimaient à la fois et Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo que j’ai connu à Ouagadougou, même pas en Côte d’Ivoire. J’ai été un adversaire de ces « Ivoiritaires » et cette position a donné l’occasion à certains de comploter contre moi pour que je parte de la tête du journal présidentiel, du parti au pouvoir, « Le Démocrate ». C’était le seul journal du pouvoir qui portait contradiction ; j’avais une position de gêne face aux oukases contre les miens, contre Ouattara de qui j’étais très proche. J’ai maintenu l’axe Abidjan-Ouaga et vous vous rappelez que le président Compaoré, dans sa sagesse légendaire, à l’époque, a écrit pour dire que Alassane Ouattara n’était pas burkinabè. Mais qui en était le chef d’orchestre ? C’était bien moi. Pendant la crise, j’étais conseiller spécial du Premier ministre Seydou Diarra sous le régime de Laurent Gbagbo. Après l’insurrection de septembre 2002, il y a eu la partition de fait du pays. Mais un pays est un tout. Nous avions entendu des propos du genre dans la partie septentrionale : « Il n’y a rien ». C’est irresponsable, méchant, ce n’est pas et ça ne le sera pas. Nous avions combattu cette thèse et mes écrits sont là pour l’attester. J’ai continué de combattre en dépit de toutes les propositions qu’ils m’ont faites, y compris des portefeuilles ministériels. Sur les réseaux sociaux, j’écrivais. J’ai posé des actes.

Si on vous suit bien, peut-on affirmer que vous avez côtoyé presque tous les pouvoirs en Côte d’Ivoire ?

La question laisse supposer que quand on est journaliste, on doit faire un choix, or, apparemment, selon votre question, il ne faut pas faire de choix. Les régimes passent mais vous, vous continuez de faire votre travail.

La question reste posée

Je suis constant dans ma position et pendant ces absences hors du pays pour sauver sa vie, il fallait que chacun d’entre nous se débrouille mais dans la dignité, la tête haute. J’ai toujours été constant dans ma position, hier comme aujourd’hui. L’axe Abidjan-Ouaga, pour moi, est un axe sacré.

Quels ont été vos rapports avec l’ex-président Laurent Gbagbo ?

Rien du tout. Je n’ai jamais travaillé avec Laurent Gbagbo sauf que j’ai été à la base de l’extradition de Sia Popo. Personne n’avait informé Laurent Gbagbo avant. Il m’a dit : « Je te donne une voiture, 100 millions, une villa et plusieurs postes ». Depuis que je l’ai informé de l’arrestation de Sia Popo, il avait du mal à entrer en contact avec le président Compaoré puisqu’il avait des positions assez arrêtées vis-à-vis de ce dernier, par complexe de la générosité antérieure du grand chef mossi. Je lui ai donc dit d’appeler le président Compaoré et il l’a fait. Djibrill Bassolet, alors ministre de la Sécurité et Boureima Badini, ministre de la Justice, garde des Sceaux, ont fait les papiers et Sia Popo est retourné le lendemain (ndlr : en Côte d’Ivoire).

Aviez-vous donc accepté les 100 millions et autres promesses de Laurent Gbagbo ?

Mais rien du tout, c’était juste des paroles en l’air.

Vous avez côtoyé Guillaume Soro. Mais quels sont les motifs de votre départ de la primature ?

J’en apprends vraiment des choses. Pourquoi ne serait-ce pas des journaux du pouvoir, donc de Guillaume lui-même qui est mon ami et mon frère, que j’ai servi, qui auraient dû en parler ? Je vous informe que lui-même m’a adressé une lettre pour me présenter ses excuses ; une lettre qui a été lue par ses émissaires. Cette lettre a infirmé ces attitudes de gens minables, ridicules qui souffrent de ce que je puisse partir de la primature la tête haute. Au fait, leur objectif était de me détruire totalement comme ils voulurent détruire Ouattara (Alassane Dramane Ouattara, ndlr) hier. C’est mon indépendance d’esprit qui les gêne parce que je n’ai jamais été otage d’un groupe et je refuse de l’être. Je n’ai qu’un seul ami que j’ai aimé et qui m’aime : j’appelle Blaise Compaoré qui est un grand, un homme humble. Au final, c’est parce que je jouis, par essence, d’une légitimité populaire qu’aucun de mes détracteurs n’a pu me détruire. Je ne boxe pas sur le même ring qu’eux. Le ring sur lequel je boxe, aucun d’entre-eux n’ose boxer là-dessus. C’est par humilité que je parle ainsi, sinon j’aurais dit des choses gravissimes. Il y a un temps pour tout : un temps pour le mensonge et un autre pour la vérité. Donc, c’est parce que je dérange. Pas un seul kopeck je n’ai détourné. J’en veux d’ailleurs à mon ami Guillaume Soro. Il m’aurait donné beaucoup d’argent pour que je sois aujourd’hui à l’aise. Je dis bien il aurait dû, parce que ce n’est pas ma nature. J’aime l’argent pure. Ce sont donc les petits jaloux qui me voyaient avec Guillaume Soro, qui ont cherché à me nuire. C’est cela la vérité. Au contraire, la primature me doit même de l’argent. Quand j’y suis entré le premier avril 2003, il m’est arrivé de faire des dépenses à mes frais. D’aucuns disent que j’ai des privilèges alors que je n’ai pas été de la rébellion. Je leur réponds que j’ai fait la guerre avant eux, la guerre des idées, la guerre des arguments et la guerre de l’écriture.

Comment expliquez-vous le jusqu’au-boutisme de certains pro-Gbagbo malgré les multiples actions menées pour les intégrer dans le processus de réconciliation ?

Cela montre la nature réelle de ces gens qui se comportent comme ce tristement célèbre personnage du drame célèbre de Goethe qui ment, se renie de nouveau, ment encore, se renie de nouveau. Regardez la grande mansuétude du président Ouattara qui ouvre ses bras à ces gens qui ont voulu le détruire. Il le fait avec Guillaume Soro et le président Bédié qui, quoi qu’on dise, reste un des dépositaires de la pensée houphouétiste. La raison doit toujours l’emporter sur la colère. Le président leur tend la main alors qu’ils disent qu’ils ne le reconnaissent pas. Ils sont dans la même posture de la négation depuis que Alassane Dramane Ouattara a remporté les élections. Les arguments qu’ils développent aujourd’hui sont les mêmes arguments qu’ils développent depuis que Ouattara était chef de gouvernement sous Houphouët. Ouattara a réussi un triple défi : d’abord la famille, ensuite éviter qu’on humiliât Houphouët et enfin que le pays ne s’affaissât. Les Ivoiriens ont donc longtemps rêvé de revoir cet homme si brillant. Cet exploit a construit le mythe Ouattara, considéré comme ce brio, le gentleman-farmer sorti des banques (ADO a travaillé dans les institutions de Brettons Wood, ndlr) qui, même à l’abri du besoin, est entré dans la boue, a mis la main dans le cambouis. Mais il mouilla le maillot. Voilà cet homme qui tend la main aux pro-Gbagbo qui la refusent. Ils étaient encore dans la logique d’une tentative d’insurrection pour ébranler, à nouveau, un pays suffisamment décimé par une guerre d’une rare méchanceté, d’une cruauté de l’enfer. Vous avez, sans doute, regardé les images de la terreur à la télévision. Nous, nous avons vécu cela en direct.

Guillaume Soro était récemment à Gagnoa. Comment appréciez-vous cette visite ?

Avec beaucoup de bonheur. Il a fait preuve de grandeur, de courage. Je salue le mérite qu’il a eu d’y aller, nonobstant la psychose dont certains avaient entouré cette visite. Cet héros qui a bravé, de par le passé, les mercenaires libériens et les a vaincus, ne peut avoir peur d’aller dans une région de son propre pays. Pour rappel, on l’a fait chef dans cette région où il est allé avec fierté. Il a eu l’occasion de dire aux gens de là-bas que si leur fils (il fait référence à Laurent Koudou Gbagbo, natif de la région, ndlr) vit, c’est grâce à lui et au président Ouattara. C’est la galaxie patriotique, c’est-à-dire certains du FPI (Front populaire ivoirien, ndlr) qui ont voulu l’en dissuader alors qu’il n’en était rien du tout. Il a délivré un message de courage, de fraternité et d’amour en disant que « c’est notre terre » et que quand le président Ouattara effectuera une visite à Gagnoa, il transformera la région mieux que n’en a fait leur propre fils (Laurent Gbagbo, ndlr) pendant pratiquement onze ans de pouvoir. Histoire de leur montrer que l’on n’a pas besoin d’être de la même ethnie ou de la même tribu pour faire changer les choses dans une région. Les enfants de Houphouët que nous sommes, voyons loin. Nous sommes loyaux, généreux et gentils.

Est-il opportun, selon vous, d’extrader Simone Gbagbo à la CPI (Cour pénale internationale) ?

M. Ouattara est un homme très humain. Il n’aime pas la violence ; il en est de même pour Guillaume Soro, contrairement à ce que certains disent d’eux. C’est d’abord triste que Simone Gbagbo soit là où elle est. On aurait pu l’éviter. Cela dit, je ne crois pas qu’ils veuillent qu’il en soit ainsi. Elle est bien traitée là où elle est. Je crois qu’elle devrait apprécier ce que c’est que vivre tranquillement et avoir la générosité et la compassion des gens. Simone Gbagbo s’est familiarisée avec l’environnement et on la surprend en train de donner des cours aux enfants. Cela nous ramène à la dimension humaine que Dieu, le seul Maître, nous donne et nous rappelle que trop point n’en faut même si Dieu vous donne le pouvoir. Car aucun pouvoir n’est éternel. Vraiment, je ne pense pas que l’on veuille envoyer Simone à la CPI. Ce n’est pas du genre de Ouattara. C’est plutôt le comportement à eux (les pro-Gbagbo) qui les a mis dans cette situation.

Va-t-on vraiment l’absoudre de ses péchés au nom de la réconciliation ?

Je ne suis pas un jeteur de cauris. Je ne suis pas non plus un médium ni un cartomancien. Je ne saurais donc prédire ce que sera l’attitude du chef de l’Etat. Mais j’affirme qu’il est humaniste et généreux. C’est un homme de paix. Du reste, son comportement vis-à-vis d’elle l’atteste. En tout cas, l’avenir nous le dira.

Il y a actuellement une guéguerre au sein du PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire) en particulier et au sein du RHDP (Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix) en général. Comment expliquez-vous cette situation ?

En vérité, il n’y a pas de guéguerre en tant que telle au sein du RHDP qui est un parti regorgeant de grands hommes d’expériences comme le président Bédié et le président Ouattara qui ont l’amour de leur patrie. Ce qui a amené chacun d’eux à la gestion de l’Etat. Les plus jeunes comme Mabri Touakeuse et Anabri Koukena gèrent leur parti et ont des responsabilités qu’ils assument avec beaucoup de sérieux et d’application. Mais il y a les ambitions des hommes, des troupes. Chacun veut être député, maire, président de Conseil régional, etc. Cela cause donc un problème interne. C’est un peu comme dans vos conseils de rédaction : on discute, on se dispute même souvent. Mais au finish, il y a un consensus et on avance. C’est exactement ce qui se passe au sein du RHDP. Mais au sein du PDCI, il y a, si vous me permettez le terme, une contestation du président Bédié avec en toile de fond, quelques personnalités qui n’ont pas le courage de montrer leur véritable visage. Mais c’est compréhensible parce que c’est un grand parti qui a bâti la Côte d’Ivoire.

Et quelles sont ces personnalités ?

Non, je ne fais que vous donner des informations. Si vous voulez les rechercher, je vous donne ainsi des pistes. Je me contente de vous dire que c’est un parti qui est très attaché au respect des anciens. C’est donc un parti fondé sur l’orthodoxie du respect de l’âge. C’est sa colonne vertébrale et morale. Les jeunes d’aujourd’hui qui n’ont pas cette culture du passé du parti, qui envient leurs camarades comme Blé Goudé et bien d’autres qui sont devenus des ministres, finissent par dire aux anciens qu’ils n’ont pas le temps d’attendre. Ils disent qu’ils sont fatigués d’être dirigés par les mêmes gens. Ceux qui sont pressés au point de dénaturer cette logique familiale et historique du parti, n’y pourront rien. Le président Bédié restera en place et sera entouré de la même baronnie qui est la congrégation gardienne de la doctrine du parti. Il en sera ainsi.

Vous avez parlé tantôt de Blé Goudé. Que pensez-vous du sort de ce dernier ? Ses avocats disent qu’il subit des tortures dans son lieu de détention. Est-ce vrai tout cela ?

Dieu seul sait ce que notre ami et jeune frère a fait en Côte d’Ivoire. Il a été pris par la police qui l’a extradé, il a été mis aux arrêts comme bien d’autres. Les cas de tortures avancés ne sont pas du genre du pouvoir de Ouattara. Tout ce qui se raconte n’est que préjugés et supputations qui n’ont rien à voir avec la vérité. Blé Goudé est traité comme un être humain, conformément aux recommandations des Nations unies. Le président Ouattara, dans sa mansuétude, a mis tous les pro-Gbagbo dans les mêmes conditions. C’est un régime ouvert. Le reste, c’est la Justice qui s’en chargera.

Il mérite donc son sort ?

Les faits sont là.

L’avez-vous approché pendant ses dérives ?

L’approcher, c’est trop dire. Chacun avait la liberté de parole en Côte d’Ivoire. Ils avaient réussi à caporaliser la télé qui était l’épicentre du conflit, du début jusqu’à la fin. Mais cela a été une mauvaise utilisation à sens unique du média d’Etat et cela les a rattrapés.

Parlons à présent du foncier et de la nationalité en Côte d’Ivoire. Le président Ouattara a ressuscité une vieille loi sur le foncier. Va-t-on vers une résolution totale de ces problèmes en Côte d’Ivoire ?

M. Ouattara est un homme de justice et d’équité. Il en a souffert comme jamais personne ne l’a été avant lui. Tous les scénarii orchestrés par les uns et les autres n’ont pas marché parce que Dieu avait écrit qu’il deviendrait et ce qu’il est devenu. Donc vanité des vanités. Il arrive au pouvoir, il observe que cette crise lamentable et inutile résulte de la très mauvaise gestion volontaire d’une élite qui a voulu se transmettre le pouvoir par atavisme. Ce qui l’a conduite très loin au point de la dépasser. Donc Ouattara s’est rendu compte que cette loi, votée depuis longtemps mais qui n’avait jamais été appliquée, n’est pas mauvaise en elle-même. Il s’agit de donner dix ans à tous ceux qui étaient concernés, de se régulariser. On va dédommager ceux qu’on doit dédommager et ceux qui n’ont pas de problème, de conserver leur nationalité. Vous verrez que ceux qui ont des démangeaisons cérébrales auront forcément matière à polémiquer là où il n’y en a pas. En dépit de ce qu’ils ont fait hier, ils ont été proprement battus.

Venons-en à la nation burkinabè. Quelles burkinabè sont vos relations avec Blaise Compaoré ?

Le président du Faso est mon frère. C’est un humaniste, un homme d’une très grande générosité, un homme très ouvert, un homme d’un calme olympien. Il a été ministre de la Justice, Garde des sceaux de son pays. En son temps, il a élargi beaucoup de personnes. Il a permis que tous ceux qui ont été emprisonnés, retrouvent leurs droits. C’est Blaise Compaoré qui a fait ça. Je note aussi le pluralisme et l’élargissement des espaces d’expression dans ce pays, qui est à son actif. Je vois des prestations télévisées, je vois des propos que certains tiennent sur leur président. Eh bien, il faut être très ouvert, très généreux pour admettre cela. Jamais ailleurs, on n’admet cela. Il estime donc qu’il faut laisser le peuple parler. Cela fait pratiquement 23 ans que j’ai la chance et le bonheur de cheminer avec lui. Ce qui bat en brèche toutes les thèses curieuses et stériles dont vous parlez tantôt. C’est ici, avec lui, que j’ai bâti ma carrière plutôt que chez moi en Côte d’Ivoire. Tout ce que je souhaite, c’est que ce pays ne connaisse pas ce qu’a connu la Côte d’Ivoire ; que ce pays soit épargné du syndrome ivoirien. Car le Burkina, c’est aussi notre patrie. Vous avez d’ailleurs vu l’élan de solidarité des Burkinabè dans cette crise ivoirienne.

Blaise Compaoré a peut-être accordé la liberté aux Burkinabè, mais la liberté ne s’octroie pas sur un plateau d’argent ; elle se conquiert plutôt. Est-ce que, quelque part, le peuple burkinabè n’a pas mérité cette liberté ? On vous rappelle que c’est un des rares peuples à avoir mené avec succès un soulèvement populaire ; c’était le 3 janvier 1966.

Quel grand peuple, le Burkina Faso ! Depuis des temps immémoriaux, cet empire (que je me plais à rappeler à d’autres), avait des valeurs. Ce sont les mêmes valeurs qui continuent aujourd’hui. Il y a une conjonction de facteurs positifs entre les aspirations du peuple et celles du chef qui a compris la nécessité d’ouvrir, de comprendre et de permettre aux uns et aux autres de s’exprimer souvent de manière virulente et voire désobligeante. Mais je considère que cela aussi fait partie de la vie. Quand on est chef, on doit être tolérant. Qu’à cela ne tienne, la liberté d’expression ne donne pas le droit d’injurier. L’orthodoxie et la déontologie commandent qu’il y ait une limite que beaucoup franchissent allègrement. Certains chefs n’acceptent pas cela. C’est en cela qu’il faut reconnaître le mérite au président du Faso.

Vous vous êtes trop attardé sur l’appellation « chef », parlant de Blaise Compaoré. Beaucoup de Burkinabè pensent qu’il se comporte comme un chef traditionnel. Ils en veulent pour preuve le fait qu’il est au pouvoir depuis 26 ans et ne parle pas encore de son départ. Quel commentaire faites-vous sur cette pensée de certains Burkinabè ?

Peut-on empêcher quelqu’un ou des personnes d’exprimer leurs opinions ? Je sais qu’il y a des chefs traditionnels ici avec pour chef suprême le Mooro Naba à qui je fais mes révérences. Il y a la société traditionnelle africaine qui est l’une des forces du Burkina Faso à côté de laquelle il y a la république. Si Houphouët n’avait pas duré au pouvoir il n’aurait pas construit la Côte d’Ivoire comme c’est le cas de Blaise qui a réussi à construire le Burkina Faso. On ne peut pas plaire à tout le monde. Comme on le dit, Dieu même n’a pas fait l’unanimité. La longévité, c’est Dieu qui la donne dans la paix, la générosité et la partage. L’air que nous respirons, c’est le même air que le président du Faso respire, c’est le même que le Mooro Naba respire et que vous et nous respirons gratuitement. On ne nous demande pas de payer.

Vous disiez tantôt, concernant Gbagbo, que trop point n’en faut même si Dieu vous donne le pouvoir.

Attention, je l’ai dit par rapport à un groupe d’individus qui ont été des « négateurs » face à une élection qui a eu lieu. Des gens qui ont cru que le pouvoir était leur propriété privée et qui ont ainsi refusé de se plier. Cela dit, c’est une chance d’avoir un chef qui dure. C’est une chance que certains convoitent eux-aussi, parce que le chef a réussi à transformer le pays en une société enviée et convoiter. Beaucoup qui parlent aujourd’hui, je peux l’attester, ont été partisans, sont tributaires de cette gestion positive. Je vois des travaux partout au Burkina. On a même créé une autre ville. C’est Ouaga entière qui a tété transformé positivement.

Autrement dit, vous êtes pour l’usure du pouvoir et d’accord pour le culte de l’indispensabilité ?

Je n’en retiens ni l’un ni l’autre. J’observe que ce grand pays n’a pas le droit, et je prie Dieu qu’il n’en soit pas ainsi, de ressembler à ces pays qui se sont auto-flagellés et autodétruits. Regardez l’Orient, le Moyen-Orient, le Maghreb et bien d’autres pays où les gens restent dans la forêt pendant longtemps et viennent s’asseoir au pouvoir parce que la tête du chef ne leur plait pas. Il faut plutôt remercier le grand chef visionnaire que le monde entier récompense et félicite pour nombre de ses services oh combien bonifiants et honorants ! Je suis un patriote au sens latin du terme, qui aime la paix.

Mais quels sont les conseils que vous donnez à votre ami Blaise pour que cette paix que vous souhaitez tant soit préservée, d’autant qu’on lui prête l’intention de vouloir s’éterniser au pouvoir ?

Sur ce point précis, je n’ai ni de conseils ni de leçon à donner à mon frère qui est un homme suffisamment éclairé, plus que beaucoup de gens ne le pense. On lui prête des intentions, les gens parlent mais sont très loin de ce qu’il pense. L’élection présidentielle est programmée pour 2015 et nous sommes en 2013. Pendant ce temps, Blaise veut continuer à bâtir son pays dans la paix. Le moment venu, on en parlera.

Vous ne croyez pas que c’est là un défaut ? Pourquoi il n’en parle pas maintenant ?

Il parle quand cela est nécessaire. Mais les ragots, les supputations et potins des gens dans la ville, Blaise n’a pas le don d’ubiquité pour être partout. Il gère un pays. Le président des Etats-Unis l’appelle, le président de la République française l’appelle, l’Union européenne l’appelle, l’Union africaine l’appelle, la CEDEAO l’appelle, le monde entier l’appelle pour lui dire ceci : « sois notre porte-parole ici et là ». Le Et pendant ce temps, certains anciens qui étaient avec lui hier s’agitent, s’excitent…

De qui parlez-vous ?

Vous le saurez le moment venu.

N’est-il pas temps pour Blaise de préserver tous ces acquis que vous avez énumérez, plutôt que de les vendanger en prenant une décision qui viendrait à mettre à mal la stabilité du pays ?

Qui vous dit que demain, il n’y aura pas quelqu’un qui viendra vendanger le pays plus que ça, qui va même tout détruire ? Il y a des prises de position de certains groupes ici que j’ai s’est trouvée totalement scandaleuse et sectariste contre une partie du peuple là ou leur rôle fondamental est d’unir.

Vous parlez donc de la sortie de l’Eglise catholique burkinabè sur la mise en place du sénat ?

J’ai lu une déclaration qui m’a laissé totalement dépité. Parce que le rôle fondamental de Dieu qui est amour, est de chercher la conciliation et non pas choix partial en épousant des thèses claires contre d’autres. Je pense que demain sera un autre jour. Il y a une autre méthode, une autre manière d’honorer le chef en pays moaga. On n’humilie pas le chef en pays moaga et tous ceux qui l’ont fait en ont payé le lourd tribut.

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