Côte d’Ivoire : toutes plumes et griffes dehors

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Deux livres évoquent la nationalité controversée de Ouattara, la personnalité de son épouse, les dessous de la crise de 2010 et le rôle de la France. Polémique assurée en pleine période d’élection présidentielle.

Ceux qui s’intéressent de près aux relations entre la France et la Côte d’Ivoire ont forcément croisé son chemin. Avec ses manières « vieille France », sa double nationalité franco-ivoirienne et sa fidélité sans faille à Laurent Gbagbo, dont il fut le conseiller et dont il reste le porte-parole en Europe, Bernard Houdin est un singulier personnage.

Son actualité ? Il vient de publier Les Ouattara. Une imposture ivoirienne, un livre à charge contre le couple présidentiel, dans lequel il tente de prouver que la chute de Gbagbo est le fruit d’un complot ourdi de l’extérieur depuis 2002. Revenant longuement sur la nationalité controversée d’Alassane Ouattara, il consacre aussi un long chapitre à la femme de ce dernier, Dominique, sans qui l’intéressé « n’aurait jamais été président ». Une vision pour le moins partisane que les Ivoiriens n’auront pas l’occasion de découvrir, les principaux réseaux de distribution de livres ayant décidé de ne pas le diffuser.

Un proche de Gbagbo depuis 2007

Le parcours et les prises de position de Bernard Houdin ont bien souvent alimenté des polémiques. Né en juillet 1949 à Paris, il est le fils d’un entrepreneur qui construisit les premiers ponts du pays (Général-de-Gaulle, Houphouët-Boigny) et l’Hôtel Ivoire. Arrivé à Abidjan le jour de son premier anniversaire, Houdin revient en France en 1963. Le lycéen parisien fréquente Occident, un mouvement politique nationaliste fondé en 1964, avant d’adhérer, quelques années plus tard, au GUD (Groupe union défense), une organisation étudiante d’extrême droite réputée pour ses actions violentes et dont il deviendra le secrétaire général en 1973. « De l’histoire ancienne », assure aujourd’hui Bernard Houdin, sans pour autant la renier.

Pendant la crise, celui qui est devenu un proche collaborateur de Gbagbo fait la navette entre Paris et Abidjan pour plaider la cause de Gbagbo

Il ne retournera à Abidjan qu’en 1975 comme coopérant, mais ce n’est que douze ans plus tard qu’il fait la connaissance de Laurent Gbagbo, à l’aéroport de New York. C’est finalement en 2007 que les deux hommes se rapprochent. Houdin s’est spécialisé dans la gestion des ordures ménagères, Gbagbo lui commande un rapport sur l’insalubrité à Abidjan avant de le nommer conseiller spécial pour la salubrité urbaine.

Pendant la crise, celui qui est devenu un proche collaborateur du président fait la navette entre Paris et Abidjan pour plaider la cause de Gbagbo auprès des responsables français dans les milieux politiques, économiques et médiatiques. Un lobbying qu’il poursuit depuis aux quatre coins du monde, entre deux visites à la prison de Scheveningen, dans la banlieue de La Haye, où est incarcéré l’ancien président en attendant l’ouverture de son procès devant la Cour pénale internationale, le 10 novembre.

La littérature « polémique » a-t-elle du succès ?

Bernard Houdin n’est pas le seul, en France, à s’être penché sur les conditions dans lesquelles Alassane Ouattara est arrivé au pouvoir. Dans France-Côte d’Ivoire. Une histoire tronquée, la journaliste Fanny Pigeaud, connue notamment pour son enquête Au Cameroun de Paul Biya, parue en 2011, propose une autre lecture de la crise ivoirienne et des rapports tumultueux entre Paris et Abidjan au cours des années 2000. Dans son ouvrage, entamé en 2012 alors qu’elle était correspondante en Côte d’Ivoire pour Mediapart et Libération notamment, Fanny Pigeaud fait elle aussi un procès en règle du rôle joué par la France dans cette crise.

Difficile de dire si cette littérature « polémique » rencontre un réel succès. Les 15 000 exemplaires de France-Côte d’Ivoire. Une histoire tronquée, initialement tirés en France, au Canada, en Belgique, en Suisse et en Côte d’Ivoire, ne sont pas encore épuisés, indique l’éditeur Vents d’ailleurs, sans toutefois préciser les chiffres des ventes. Il en va de même pour les 10 000 exemplaires de l’ouvrage de Bernard Houdin. Une chose est sûre : cinq ans après la crise, les passions ne sont toujours pas éteintes.

Vincent Duhem

Jeuneafrique.com

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