Côte d’Ivoire : Les innovations majeures du projet de nouvelle Constitution ivoirienne

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Abidjan, 24 oct (AIP)- Le projet de nouvelle Constitution de Côte d’Ivoire qui sera soumis au référendum, le 30 octobre, avec 184 articles, comporte des innovations majeures devant garantir « une stabilité durable » et un développement socio-économique soutenu, selon le président Alassane Ouattara.

Egalité de droits sans discrimination

L’Article 4 de ce projet de Constitution stipule que « Tous les Ivoiriens naissent et demeurent libres et égaux en droit », ajoutant que «  nul ne peut être privilégié ou discriminé en raison de sa race, de son ethnie, de son clan, de sa tribu, de sa couleur de peau, de son sexe, de sa région, de son origine sociale, de sa religion ou croyance, de son opinion, de sa fortune, de sa différence de culture ou de langue, de sa situation sociale ou de son état physique ou mental ». Cette disposition intègre formellement à la Constitution l’interdiction de toute forme de favoritisme et de la discrimination.

Ecole obligatoire

Si ce projet est adopté, l’obligation de scolariser les enfants (Article 10) sera désormais une norme constitutionnelle en Côte d’Ivoire, renforçant ainsi la loi sur « l’école obligatoire pour les enfants des deux sexes ».

Interdiction du travail des enfants

« Le travail des enfants est interdit et puni par la loi. Il est interdit d’employer l’enfant dans une activité qui le met en danger ou qui affecte sa santé, sa croissance ainsi que son équilibre physique et mental», note le projet de nouvelle Constitution en son Article 16. La Côte d’Ivoire a été souvent pointée du doigt quant à l’utilisation d’enfants pour travailler  dans des plantations de cacao, pourrait démontrer, avec cette disposition, aux yeux du monde son engagement à lutter efficacement contre ce fléau.

Criminalisation du déversement des déchets toxiques

Selon l’Article 27 du projet de Constitution, qui garantit le droit à un environnement sain à tous sur l’ensemble du territoire national, « le transit, l’importation ou le stockage illégal et le déversement de déchets toxiques sur le territoire national constituent des crimes imprescriptibles ». Le pays, rappelle-t-on, avait connu, en 2016, le déversement de déchets toxiques issus du navire Probo Koala à divers endroits d’Abidjan, qui avait entrainé la mort de 17 personnes et l’intoxication de plus de 43.000 personnes selon l’Institut national d’hygiène publique.

Protection des personnes vulnérables, âgées et handicapés

« L’Etat s’engage à garantir les besoins spécifiques des personnes vulnérables. Il prend les mesures nécessaires pour prévenir la vulnérabilité des enfants, des femmes, des mères, des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Il s’engage à garantir l’accès des personnes vulnérables aux services de santé, à l’éducation, à l’emploi, à la culture, aux sports et aux loisirs», indique l’Article 32, complété par l’Article 33 qui engage les collectivités à trouver des solutions pour une meilleure intégration de ces personnes.

Conditions d’éligibilité à la présidence de la République

L’un des grands changements prévus par le projet de Constitution concerne les conditions d’éligibilité à la présidence de la République (Article 55). Contrairement à la Constitution de 2000, en vigueur, qui stipule que le candidat à l’élection présidentielle doit être « Ivoirien d’origine, né de père et de mère, eux même Ivoiriens d’origine », ce projet prévoit qu’ « il doit être exclusivement de nationalité ivoirienne, né de père ou de mère Ivoirien d’origine ».

Aussi, la limite d’âge maximum du candidat qui est jusque-là fixée à 75 ans, est levée par le projet de loi fondamentale à soumettre à référendum le 30 octobre, selon lequel «le candidat à l’élection présidentielle doit jouir de ses droits civils et politiques et doit être âgé de trente-cinq ans au moins ».

Vice-présidence

En son article 55, le projet de nouvelle Constitution prévoit l’institution d’un poste de Vice-président. Ce dernier, qui est élu au même moment que le président de la République sur le même ticket, assure l’intérim de ce dernier en cas de vacance « par décès, démission ou empêchement absolu » (Article 62).

« En cas de décès, de démission ou d’empêchement absolu du vice-Président de la République, alors que survient, la vacance de la Présidence de la République, les fonctions de président de la République sont exercées par le Premier ministre », complète l’Article 62.

Cette nouveauté dans le projet de Constitution constitue, selon les partisans du « Oui » avec à leur tête le président Alassane Ouattara, un « gage de stabilité » et permet d’éviter les problèmes liés à la succession du président de la République en cas de Vacance. Par contre, les partisans du « Non » comme Bamba Moriféré estiment que ce poste de vice-président consacre à la Côte d’Ivoire un « régime monarchique », et « représente un recul dangereux pour la démocratie et une menace avérée et grave pour la paix sociale ».

Indépendance du pouvoir judiciaire

Au niveau du système judiciaire, contrairement à la Constitution de 2000 qui indique que la chef de l’Etat préside le Conseil supérieur de la Magistrature, le projet de nouvelle Constitution propose en son Article 139 : « Le pouvoir judiciaire est indépendant. Le Président de la République est le garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Il est assisté par le Conseil supérieur de la Magistrature », avant de compléter (Article 145) que « le Conseil supérieur de la Magistrature est présidé par une personnalité nommée par le Président de la

République parmi les Hauts magistrats en fonction ou à la retraite ».

L’Article 140 ajoute également que « les magistrats du siège sont inamovibles » et « ne peuvent pas être mutés sans leur accord, sauf nécessités de service ». « Ils ne peuvent être révoqués, suspendus de leur fonction, ou subir une sanction disciplinaire qu’en cas de manquement à leurs obligations et après décision motivée du Conseil supérieur de la Magistrature », note le même article, qui protège le magistrat contre «toutes formes d’ingérence, de pression, d’interventions ou de manœuvres, ayant pour effet de nuire à l’accomplissement de sa mission ».

Chambre des rois, Sénat et Conseil économique et social

Déjà instituée par décret en 2015, la Chambre nationale des rois et chefs traditionnels est constitutionnalisée avec le projet de nouvelle Loi fondamentale, en son Article 175. Représentant les « gardiens de la tradition », elle est « chargée notamment: de la valorisation des us et coutumes ; de la promotion des idéaux de paix, de développement et de cohésion sociale ; du règlement non juridictionnel des conflits dans les villages et entre les communautés », note le texte.

Sur ce sujet, le juriste ivoirien Dr Séverin N’Datien Guibessongui note que « cela participe de la pérennisation de nos us et coutumes et assure une forme de continuité de ces Autorités traditionnelles et coutumières ».

Par ailleurs, une autre innovation dans le projet de Constitution, c’est la création d’un Sénat constituant désormais une deuxième chambre pour le parlement. Selon l’Article 85, « le pouvoir législatif est exercé par le Parlement » qui est « composé de l’Assemblée nationale et du Sénat ».

« Le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales et des Ivoiriens établis hors de Côte d’Ivoire. Les sénateurs sont élus, pour deux tiers, au  suffrage universel indirect. Un tiers des sénateurs est désigné par le Président de la République parmi les Ivoiriens reconnus pour leur expertise et leur compétence avérées dans les domaines politique, administratif, économique, scientifique, culturel, sportif, professionnel et social. Le mandat des sénateurs est de cinq ans », précise l’Article 87.

Selon le Dr Guibessongui, « le sénat qui est la deuxième chambre du parlement, a donc une fonction législative comme la première chambre du parlement qui est l’Assemblée nationale ». « Les deux chambres forment le Congrès. Lorsqu’elles sont réunies, c’est le Président de l’Assemblée nationale qui préside le Congrès. Il s’agit, au niveau du sénat, d’assurer une forme de représentation indirecte du peuple », explique le juriste.

Toujours au niveau institutionnel, le Conseil économique et social, voit son pouvoir renforcé et devient « Conseil économique, social environnemental et culturel ». Selon l’Article 163, cette institution aura désormais pour mission de  donner son avis sur les projets de loi, d’ordonnances ou de décrets, ainsi que sur les propositions de loi qui lui sont soumis. « Les projets de loi de programme à caractère économique, social, environnemental et culturel lui sont soumis pour avis. Le Président de la République peut consulter le Conseil économique, social, environnemental et culturel sur tout problème à caractère économique, social, environnemental et culturel », détaille cette disposition.

Parité hommes-femmes

En matière d’emploi, le principe parité entre les hommes et les femmes sera désormais constitutionnalisé avec le projet de nouvelle Constitution. L’Article 37 de ce texte stipule que « l’Etat œuvre à promouvoir la parité entre les hommes et les femmes sur le marché de l’emploi ». « L’Etat encourage la promotion de la femme aux responsabilités dans les institutions et administrations publiques ainsi qu’au niveau des entreprises », souligne le même article.

Le droit de propriété est garanti à tous.

Nul ne doit être privé de sa propriété si ce n’est pour cause d’utilité publique et sous la condition d’une juste et

préalable indemnisation. Selon l’article 12 du projet de nouvelle Constitution, seuls l’Etat, les collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes peuvent accéder à la propriété foncière rurale. Les droits acquis sont garantis. La loi détermine la composition du domaine foncier rural ainsi que les règles relatives à la propriété, à la concession et à la transmission des terres du domaine foncier rural.

En attendant l’adoption ou non de ce projet au référendum du 30 octobre, la campagne référendaire est ouverte et en cours depuis samedi sur toute l’étendue du territoire national jusqu’au 28 octobre à minuit.

AIP

 

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