Côte d’Ivoire : l’aile politique des FN de Guillaume Soro doit déclarer son identité politique.

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La thématique de la réconciliation nationale ne saurait guère tenir lieu d’offre  partisane et encore moins de programme politique du candidat des Forces Nouvelles, pour l’élection présidentielle de 2020. La réconciliation est une demande judiciaire. Elle est adressée aux juges et non pas aux politiciens. La problématique centrale de cette campagne présidentielle prématurément ouverte est que les offres politiques correspondent aux demandes sociales des Ivoiriens. Le peuple ivoirien a besoin de savoir ce que les partis et les groupes politiques en compétition pour l’exercice du pouvoir en 2020, lui proposent relativement aux demandes sociales catégorielles, à la politique intérieure et extérieure, au développement économique endogène, au service de  l’Intérêt général et du bien commun. Le groupe Guillaume Soro est appelé à jouer sa partition sur ce registre.

Ayant visité dans son « Orthodoxie du soroïsme », la compilation d’idées que Franklin Nyamsi, l’intellectuel organique du groupe, propose en guise de grandes lignes du soroïsme destinées à guider l’action politique du candidat des FN, j’ai découvert un écrit apologique relevant du culte de la personnalité. Je n’y ai trouvé aucune ébauche d’une Weltanschauung politique, d’une vision du monde, d’une offre politique, d’un courant idéologique libéral, socialiste, ou conservateur.

Tel un encensoir, Franklin Nyamsi  fait l’éloge de son employeur. Il le campe en personnalité exceptionnelle et en homme fort dans un écrit déclaratif décrivant une rencontre entre Guillaume Soro et les institutions. Dans cet écrit apologétique de Franklin Nyamsi, ce n’est pas Guillaume Soro qui s’élève à la hauteur de l’esprit des institutions en faisant l’effort de l’incarner en sa personne. Guillaume Soro est placé sur le même plan que  les Institutions et leur esprit dans une forme d’horizontalité. Ils vont à la rencontre l’un de l’autre en un cheminement réciproque. Selon Franklin Nyamsi, Guillaume  Soro est élu par la Providence et il va à la rencontre de son destin.

Franklin Nyamsi pose ainsi l’individu particulier Guillaume Soro en homme providentiel autosuffisant et le décrète « personnalité exceptionnelle ». « L’orthodoxie du soroïsme ou les idées politiques fondamentales de Guillaume Soro »  est le discours déclaratif et apologétique de Franklin célébrant Guillaume Soro. Il est destiné à le situer en homme fort et en homme providentiel allant à la rencontre du peuple ivoirien selon la logique d’une démocratie plébiscitaire. « L’orthodoxie du soroïsme », n’est que le texte programmatique d’un culte débridé de la personnalité.

 Nous reviendrons sur les contradictions internes de ce texte dans des contributions où je m’attacherai à ruiner cet écrit apologétique. Il suffit aujourd’hui, pour notre propos, de souligner de manière liminaire, quelques contradictions manifestes du « soroïsme » définissant son évanescence et sa faiblesse interne.

Ainsi l’antienne de la lutte contre l’ivoirité, version du nationalisme identitaire, un marqueur du soroïsme  démenti par la recherche éperdue d’une alliance politique du  groupe Guillaume Soro avec les identitaires ivoiriens pour des motivations électoralistes sous le couvert commode de la réconciliation nationale. Ainsi encore, l’engagement pour la démocratie démenti par un désir concret de se soustraire au principe de l’élection intra-partisane pour obtenir une dévolution gracieuse de la candidature du RDR à la présidentielle. Ainsi aussi, la préférence du Président de l’Assemblée nationale  pour une démocratie directe plébiscitaire au détriment d’une démocratie indirecte représentative qui repose sur le rôle central des partis. La question de l’identité politique réelle du groupe Guillaume Soro reste donc entièrement posée.

Tout le monde le sait. Les individus et les collectivités de la société civile doivent posséder chacun une identité civile pour exister socialement et une carte d’identité nationale pour participer activement à la vie de la cité. Il en est de même dans la société politique et a fortiori dans l’Etat. Dans les démocraties représentatives, la vie politique est impossible quand les identités des partis, médiateurs vitaux entre la société civile et l’Etat, ne sont pas constituées et publiquement déclarées.

Le flou et la confusion des identités partisanes favorisent les escroqueries politiques et les tromperies électorales. Le principe d’identification sociale et politique des partis  est donc une exigence en démocratie. Le libre choix des dirigeants est impossible quand l’identité idéologique et les programmes des acteurs politiques qui sollicitent son vote lui sont cachés.  Conformément à ce réquisit de la démocratie représentative, la question de la carte d’identité doit être légitimement posée au groupe dissident du RDR et qui prétend à l’exercice du pouvoir en 2020.

La dissidence ouverte de ce groupe avec le RDR dont il s’est quasiment séparé n’en fait plus un courant de ce parti politique. A supposer que cette dissidence soit motivée par un désaccord idéologique, le courant idéologique précis du groupe Guillaume Soro n’a guère encore été thématisé et clairement déclaré au peuple souverain qui le réclame. Sa base socioprofessionnelle n’a encore aussi guère été identifiée.

Quelle est la base socio-professionnelle du groupe Guillaume Soro ? De quelle obédience idéologique se réclame-t-il ? Quelle est son identité sociale ? Quelle est son identité politique ? La compétition électorale pour la Présidentielle de 2020 ayant été prématurément ouverte en 2017, la déclaration des identités partisanes et la présentation minimaliste des programmes politiques et des projets sociétaux doit constituer la substance des affrontements inter-partisans actuels en Côte d’Ivoire. (A suivre)

Dr Alexis Dieth

Professeur de philosophie

Cedea.net

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